si le cinéma d’animation de Disney est accusé d’américaniser le folkloreoccidental, qu’en est-il du cinéma d’animation soviétique avec la figure de la sorcièreBaba Yaga ? Loin de la propagande de l’agit-prop, la sorcière sert les intérêts du Partid’une manière indirecte en participant à façonner un sentiment d’appartenancenationale. Supposément intemporel, le folklore russe est une construction liée à laquête toujours inachevée d’une identité russe définie. Baba Yaga, figure surgie d’unpassé mythique, continue d’inscrire l’imaginaire national dans la tradition tout enévoluant avec le temps. Le questionnement typiquement soviétique d’un art nationalse distinguant en « n’étant pas » tout en peinant à définir ce qu’il « est » atteintson paroxysme à travers les différentes figures de Baba Yaga. À travers le symbolenational de cette sorcière de conte de fée s’expriment les changements sociétauxqu’a connus la Russie au cours du xxe siècle. De décennie en décennie, Baba Yagaévolue et se modernise. Animée, elle conserve pourtant son identité visuelle avec larépétition d’éléments iconiques d’un style graphique à un autre et reste identifiableau premier coup d’oeil qu’importe la technique employée. Traversant le xxe sièclesans prendre une ride, elle est l’une des images du folklore russe menacée d’êtreoccidentalisée. Figure résiliente encore aujourd’hui des long-métrages d’animationrusse, qui cherchent à concurrencer le cinéma américain en imitant leurs procédéstout en usant d’un folklore typiquement national familier, la Baba Yaga subsistecomme un point de repère essentiel de l’histoire de l’animation russe et soviétique.