Dans cet article, je me propose de réfléchir à la situation particulière dont « jouit » Mihai Eminescu (poète très important pour la fin du romantisme européen et roumain), qui continue de nos jours à être célébré, dans les textes canoniques et scolastiques roumains d’histoire littéraire, comme étant « le poète national ». Il continue aussi – comme il y a un siècle – à fonctionner comme un fort symbole politique de toutes sortes d’idéologies en quête de fondements locaux et à servir d’argument « d’identité nationale » dans des débats absolument indifférents à son œuvre littéraire. Dans le sillage des études que j’ai publiées, ces vingt dernières années, sur les formes et implications de ce mythe culturel roumain, j’interroge à présent de nouvelles histoires littéraires contemporaines, des ouvrages lexicographiques récemment publiés sous le patronage de l’Académie roumaine et d’autres textes « institutionnels », afin de voir si (et comment) la position d’Eminescu dans l’histoire de la littérature roumaine est repensée à la faveur d’un nouveau siècle. Quelle est la signification actuelle de la perpétuation du mythe du poète national, pour l’histoire de la littérature roumaine, ainsi que pour les crises identitaires roumaines ?