En abordant la question du canon littéraire par sa double fonction constitutive et représentative à l’égard de l’identité nationale, l’auteur interroge l’opposition conceptuelle sur laquelle se fondent les rapports entre postmodernisme et canon dans les littératures serbe et bulgare. Dans ces deux cultures, la pensée et la poétique postmodernes favorisent la remise en cause de la conception traditionnelle du canon et de l’histoire de la littérature. Recherchant davantage le dialogue avec les littératures étrangères, les auteurs serbes se voient reprocher de tourner le dos aux spécificités littéraires nationales qui étaient jusqu’alors mises en avant par la critique. Les écrivains bulgares en revanche se tournent volontiers vers les textes des premiers classiques bulgares, mais c’est pour les réécrire sur un mode parodique afin de dévoiler la structure littéraire des mythes nationaux. Et pourtant, malgré l’apparente incompatibilité entre postmodernisme et canon littéraire, leur rencontre dans les dernières décennies du xxe siècle a joué un rôle déterminant dans l’évolution vers une nouvelle conception de l’histoire de la littérature qui s’appuie plus que jamais sur les principes de la polyphonie et du dialogisme.