Au cours du XIXe et du début du XXe siècle, les philologues tchèques travaillèrent activement sur la variante cultivée de la langue. Dans les années 1930, le Cercle linguistique de Prague proposa une théorie de la langue standard et de culture de la langue, basée sur le critère fonctionnel, qui devint la base de toute réflexion sur la langue standard tchèque jusqu’à présent. Dans les années 1990 et 2000, certains bohêmistes considérèrent le tchèque standard ainsi conçu comme un code imposé, en conflit avec les usages quotidiens, et cherchèrent de nouvelles solutions.
Cet article analyse comparativement les trajectoires de langues fenniques minoritaires ou dialectales au sein de l’espace postcommuniste constitué de la Lettonie, de l’Estonie, de l’oblast de Leningrad et de la république de Carélie. Il s’appuie sur un travail interdisciplinaire en sciences sociales. Cette étude analyse à la fois des matériaux conservés au sein de musées ou d’institutions de recherche, mais emploie également l’enquête ethnographique de terrain, en immersion de moyenne durée au sein des communautés (locuteurs, chercheurs, ONG). Elle s’intéresse aux communautés lives, votes, ingriennes, de Kihnu et Manilaid, caréliennes et vepses. Elle cherche à mettre en regard l’évolution postcommuniste de ces langues, en s’intéressant à leur vitalité, en termes d’évolutions quantitatives et qualitatives des locuteurs, mais aussi en termes d’évolution aréales ou de politiques linguistiques (uniformisation et standardisation imposées, etc.). Ainsi, sont décryptées les politiques publiques mises en place et les grands changements intervenants en leur sein, mais également les actions d’acteurs investis dans la défense de ces langues et ces dialectes. La question de la légitimation des savoirs est posée, avec la mise en perspective des savoirs de ces ONG (et leurs mises en réseau) et des savoirs produits par les scientifiques étudiant ces communautés. À l’issue, une typologie de l’écologie de ces langues est […]
Depuis la conquête de la Sibérie au XVIe siècle et la colonisation qui a suivi, l’histoire des langues vernaculaires a souvent été liée à la politique linguistique de l’État russe, entre désintérêt, promotion et instrumentalisation. L’histoire a été écrite du seul point de vue de la culture dominante. Après un bref rappel des interactions linguistiques entre les mondes russe et autochtone dans la Sibérie impériale et soviétique, notamment à la lumière de l’école, il faudra rendre compte du point de vue des communautés elles-mêmes, à partir de l’exemple des Nénètses, des Khantys et des Mansis de la Sibérie (sub)arctique. Fondé essentiellement sur des travaux de terrain et des récits de vie collectés de 2013 à 2018 dans les toundras du district autonome Iamalo-Nénètse et dans les forêts du district autonome des Khanty-Mansi-Iougra, cet article veut restituer la parole autochtone et mettre en lumière les voies explorées par les tundroviki et tajožniki, en ce début de XXIe siècle, pour maintenir un espace vivant d’expression de soi, face aux démons intérieurs de la culture dominante et au découragement de certaines communautés elles-mêmes.
La littérature parascientifique relative aux Pélasges et à l’origine pélasgique des Albanais connaît un succès remarquable en Albanie depuis les années 1990. Due à des amateurs et s’opposant à la science officielle, elle n’en est pas moins dépendante de la production scientifique, en particulier de celle de la période communiste. L’objectif de cet article est de montrer comment les auteurs néo-pélasgistes s’emparent de la langue et ce que cette linguistique populaire doit à la période communiste.
Par le processus de désarchaïsation lexicale, les lexies auparavant marquées chronologiquement et, par conséquent, faisant partie du vocabulaire passif des locuteurs, cessent d’être senties comme appartenant à une époque antérieure et rentrent dans le vocabulaire actif d’un grand nombre d’individus. Dans cet article, nous nous intéressons aux unités lexicales qui, dans les dictionnaires de l’époque soviétique, étaient attestées comme vieillies (ou qui contenaient dans leur définition lexicographique les composantes comme « en Russie tsariste », « en Russie avant 1917 ») et qui ne le sont plus dans les dictionnaires contemporains. Nous analysons les nouveaux liens paradigmatiques et syntagmatiques des lexies en question, le développement de leur polysémie, leurs nouveaux dérivés et, dans certains cas, leur adaptation graphique et grammaticale.
Cet article propose une analyse des changements observés dans le lexique bulgare durant les années qui ont suivi la chute du régime communiste en 1989. Se fondant sur l’état actuel de la langue, il porte une attention particulière à la modification des titres de civilité et des termes liés aux différents secteurs professionnels et sociaux.Le lexique socioprofessionnel analysé est extrait d’ouvrages lexicographiques et de ressources électroniques, telles que des sites d’emploi respectant la classification standard nationale et internationale des professions et des métiers, ainsi que des journaux spécialisés dans le domaine de l’économie et des finances. L’étude de ces sources écrites est complétée par des observations sur les pratiques langagières courantes des locuteurs.Après un aperçu de la constitution du lexique socioprofessionnel au regard de l’évolution générale du bulgare moderne, le corpus sélectionné est analysé en deux temps. Il est relié, d’un côté, aux champs thématiques reflétant des transformations majeures dans la société bulgare après 1989. Il est examiné, d’un autre côté, en fonction des procédés néologiques mis en œuvre dans sa formation.
La proclamation de l’indépendance de la république du Bélarus (1991) a provoqué des changements dans la langue bélarussienne, visant principalement à diverger de la langue russe, en particulier dans le domaine du vocabulaire et de la grammaire. La concurrence de deux variantes du bélarussien littéraire (l’officielle est la narkamaŭka et la non-officielle est la taraškievica) conduit à l'interpénétration de leurs normes et à la formation spontanée auprès des bélarussophones actifs d’une approche de compromis dans leur usage de la langue qui concilie les traits les plus probants des deux variantes.
L’article propose une réflexion sur des phraséologismes nominaux extraits de Miejski, dictionnaire du parler de jeunes Polonais. La première partie expose les principales tendances et nouveautés repérées dans le polonais de la période post-transitionnelle. La seconde partie est consacrée à une analyse comparée de 553 unités phraséologiques extraites de Miejski et de chroniques humoristiques de Stefan Wiechecki publiées entre 1935 et 1937. Cette comparaison fait apparaître des continuités de comportements langagiers, notamment pour ce qui est du recours aux procédés polyphoniques chez des locuteurs de deux époques différentes.
Le phénomène de suržyk est présenté en tant que conséquence du bilinguisme russe-ukrainien du point de vue diachronique et synchronique et phénomène d’adaptation linguistique, vers le russe, mais aussi vers l’ukrainien en Ukraine post-soviétique. L’article aborde les questions de la norme et du standard et présente une analyse des particularités socio-linguistiques du suržyk avec l’appui sur le corpus littéraire et audiovisuel.
Le bilinguisme déséquilibré que nous constatons en Tchétchénie montre clairement l’hégémonie de la langue russe sur la langue tchétchène. Cependant, la situation linguistique n’est homogène ni dans le temps ni dans l’espace. En effet, si les générations plus âgées ont de larges compétences dans les deux langues, elles considèrent la langue tchétchène comme leur langue maternelle et la langue russe comme deuxième langue, alors que le contraire est vrai pour les générations plus jeunes. Les compétences en langue tchétchène de la jeune génération sont très faibles dans les zones urbaines et plus fortes dans les zones rurales.Ainsi, cet article se concentrera d’une part, sur l’influence de la langue tchétchène dans l’utilisation du russe, se manifestant notamment aux plans phonologique et syntaxique. D’autre part, mes recherches porteront sur la pénétration du russe au sein de la langue tchétchène aux niveaux phonologique, lexical et syntaxique.